Explosion devant la synagogue de La Grande-Motte : « s’en prendre à un Français juif, c’est s’en prendre à tous les Français », déclare Gabriel Attal

Au moins deux voitures, dont l’une contenant une bouteille de gaz, ont été incendiées samedi matin devant la synagogue de La Grande-Motte (Hérault), causant une explosion qui a blessé un policier municipal, a-t-on appris auprès de la gendarmerie et du maire de cette station balnéaire de 8 500 habitants.
Le Parquet national antiterroriste (PNAT) s’est saisi de l’enquête, a affirmé sur X le premier ministre démissionnaire, Gabriel Attal, en ajoutant que les forces de sécurité « traqu[ai]ent actuellement le suspect ». M. Attal, sur place, accompagné du ministre de l’intérieur démissionnaire, Gérald Darmanin, a donné à 18 h 30 une conférence de presse lors de laquelle il a déclaré que « près de deux cents policiers et gendarmes » étaient mobilisés pour rechercher l’assaillant, qui était « extrêmement déterminé ».
Gabriel Attal, qui a estimé que cette attaque aurait pu être « un drame absolu », a salué les actions qui avaient été entreprises « immédiatement ». « Ce qui s’est passé ici choque et scandalise tous les républicains de notre pays », a poursuivi M. Attal. « Une fois encore, des Français juifs ont été attaqués en raison de leur croyance et cela nous révolte et nous indigne. (…). Tous ensemble, par-delà les clivages politiques, nous devons nous mobiliser et nous dresser contre ces actes, (…) être intraitables », a ajouté le premier ministre démissionnaire avant de déclarer que « s’en prendre à un Français juif, c’est s’en prendre à tous les Français ».
« Pensées pour les fidèles de la synagogue de la Grande-Motte et tous les juifs de notre pays. Tout est fait pour retrouver l’auteur de cet acte terroriste et protéger les lieux de culte », avait déclaré Emmanuel Macron, dans un message posté sur X. Le chef de l’Etat a ajouté : « La lutte contre l’antisémitisme est un combat de chaque instant, celui de la nation unie. »
Un homme, filmé par la vidéosurveillance de la synagogue en train de quitter les lieux après l’incendie et l’explosion devant l’édifice religieux, arborait un drapeau palestinien, a appris l’Agence France-Presse (AFP) en début d’après-midi de source proche de l’enquête, confirmant une information de BFM-TV. La caméra de vidéosurveillance montre, selon une autre source proche du dossier, cet homme des bouteilles vides en main, la taille ceinte d’un drapeau palestinien.
Dans un communiqué de presse, le PNAT a détaillé le déroulé des faits : entre 8 heures et 8 h 30 samedi matin, deux véhicules ont été incendiés dans l’enceinte de la synagogue Beth-Yacoov et deux départs de feu ont été relevés sur deux portes donnant accès à l’édifice.
Le PNAT précise qu’un policier municipal, qui s’est rendu sur les lieux, a été blessé par le souffle provoqué par l’explosion d’une bouteille de gaz présente dans l’un des véhicules incendiés. Cinq personnes étaient présentes à l’intérieur de la synagogue, dont le rabbin, mais personne n’a été blessé.
Le PNAT s’est saisi des faits vers 11 heures et a ouvert une enquête pour « tentative d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste », « destructions par moyen dangereux en relation avec une entreprise terroriste » et « association de malfaiteurs terroriste en vue de préparer des crimes d’atteintes aux personnes ». Les investigations ont été confiées à la sous-direction antiterroriste, à la direction zonale de la police nationale du Sud et à la direction générale de la sécurité intérieure.
Vers 11 heures, tout le quartier de la synagogue était déjà bouclé et sécurisé par les forces de l’ordre, ont constaté des journalistes de l’AFP sur place. Le préfet de l’Hérault, François-Xavier Lauch, a « dénoncé avec la plus grande fermeté » les faits. « J’ai demandé aux policiers et aux gendarmes de renforcer la sécurité des intérêts juifs dans le département », a écrit le préfet sur son compte X. Il s’est rendu sur place dans la matinée.
Sur le réseau X, le ministre de l’intérieur démissionnaire, Gérald Darmanin, a rapporté qu’une « tentative d’incendie, manifestement criminelle », avait touché la synagogue de La Grande-Motte au cours de la matinée. « Je veux assurer nos concitoyens juifs et la commune de tout mon soutien, et dire qu’à la demande du président de la République, Emmanuel Macron, tous les moyens sont mobilisés pour retrouver l’auteur », a-t-il aussi écrit.
Le ministre de l’intérieur démissionnaire a demandé une « protection renforcée immédiate » devant les lieux de culte juifs, dans un message adressé aux préfets de l’ensemble du territoire, a affirmé son entourage à l’AFP. Dans ce message appelant au « maintien d’une vigilance absolue » pour les lieux de culte et communautaires juifs, il leur demande « de prévoir et d’assurer des gardes statiques systématiques aux heures d’entrée et de sortie des fidèles dans les lieux de culte juifs ». Il donne la même consigne en ce qui concerne les « heures d’entrée et de sortie des élèves, s’il y a lieu, devant les établissements scolaires juifs ».
Les lieux de culte juifs bénéficient déjà de mesures de protection importantes par les forces de l’ordre, compte tenu du contexte international.
Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Yonathan Arfi, a dénoncé, auprès de l’AFP, « une tentative de tuer des juifs ». « Faire exploser une bonbonne de gaz dans une voiture devant la synagogue de La Grande-Motte à l’heure d’arrivée prévisible de fidèles : ce n’est pas que s’en prendre à un lieu de culte, c’est un passage à l’acte pour tenter de tuer des Juifs », a-t-il déploré. Sur X, M. Arfi a aussi apporté son soutien au policier blessé.
Le gouvernement a régulièrement dénoncé une recrudescence des actes antisémites depuis l’attaque du mouvement islamiste Hamas en Israël le 7 octobre 2023 et la reprise du conflit à Gaza.
Au fil de la journée de samedi, les responsables politiques de tous bords ont partagé leur réaction à cette attaque, qu’ils condamnent avec force. Le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a dénoncé un « intolérable crime », sans parler d’antisémitisme. « La laïcité et la liberté de conscience [sont] fille[s] de la liberté des cultes. Nous ne l’oublions jamais », a écrit l’ancien candidat à la présidentielle, parfois accusé d’ambiguïté sur la question de l’antisémitisme.
Une de ses formules, « l’antisémitisme est résiduel en France », lui est revenue en boomerang. « L’antisémitisme n’est pas résiduel. Il est un fléau qui se combat au quotidien avec la mobilisation sans faille de l’Etat », a tweeté la ministre démissionnaire chargée de la lutte contre les discriminations, Aurore Bergé.
Au PS aussi, certains élus ont d’un même geste dénoncé un acte antisémite et égratigné La France insoumise. La présidente de la région Occitanie, Carole Delga, a exprimé son « soutien » après cet « incendie volontaire », en affirmant au passage que « l’antisémitisme est tout sauf résiduel en France ».
« L’explosion de deux voitures devant la synagogue de La Grande-Motte doit être dénoncée comme telle : il s’agit d’un acte criminel et antisémite », a affirmé le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, semblant souligner en creux que M. Mélenchon n’a lui pas parlé d’acte « antisémite ». « Ces attaques inacceptables et inqualifiables sont la conséquence de la montée de l’antisémitisme qui se répand dans notre pays », a jugé pour sa part la cheffe de file du RN, Marine Le Pen.
Les actes antisémites ont quasi triplé depuis le début de l’année, avec « 887 faits » recensés au cours du premier semestre, avait affirmé vendredi 9 août M. Darmanin, alors qu’ils étaient 304 au cours de la même période en 2023. Ils avaient déjà fortement augmenté en 2023, en particulier après le 7 octobre, selon le ministre de l’intérieur démissionnaire, qui en a recensé 1 676 durant l’année, « soit quatre fois plus qu’en 2022 ».
En mai, la synagogue de Rouen avait été incendiée, à l’aube, par un homme qui avait été ensuite abattu par la police. Des rassemblements pour soutenir la communauté juive avaient alors eu lieu à Rouen et dans plusieurs villes de France.

Le Monde avec AFP
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